Quand Dokteur Who m’a demandé comment j’avais localisé ce lieu, j’ai bien du admettre que j’avais passé un temps fou à écumer des ressources en ligne quelque peu rébarbatives. Cela me vaudra un : « tu es un grand malade ». Disons que je suis peu avare de mon temps pour certaines choses. Mais oui, passer des heures à essayer de localiser ce manoir avec comme indices une vue satellite et un élément architectural caractéristique dans l’environnement immédiat, c’est … comment dire … pénible. Jusqu’au moment où, à force de chercher, le lieu est enfin découvert.
Un grand plaisir, après tant de patience. Tant et si bien que cette visite, je lai faite il y a presque un an. Une prise de recul : comme toujours, le temps et l’espace s’imposent à nous. Un week-end seul, femme et enfants en vacances, parents je ne sais où (ou, je ne le sais que trop bien). Je pars à l’improviste pour cette visite, plein d’hésitations, de remords, de « j’y vais, je n’y vais pas » . A la sortie de l’autoroute, je ne peux m’empêcher de prendre des nouvelles. Tout va bien. C’est essentiel, diffus, on sent le non-dit, mais ça rassure, déculpabilise. Quoi que … Déjà deux heures de route.
J’attends beaucoup de cette visite, c’est un grand classique de l’urbex que je ne connais pas encore. L’approche n’est pas des plus simples dans ce petit village. Cette fois-ci, involontairement, je peux passer pour un randonneur. Un mec qui marche dans la campagne, avec son masque (pandémie oblige) et son sac à dos. Le muret est à ma gauche. Et évidemment, le voisin bordélique arrive et me salue. Je continue mon chemin, mine de rien. Et fais demi-tour une fois la camionnette au chaud dans son garage, cette fois-ci un peu plus prompt à franchir les quelques pierres qui m’isoleront des regards.
L’ambiance est tout de suite apaisante dans ce jardin. C’est dense, mais comme d’habitude, il suffit de suivre le chemin tracé. Aucune difficulté à entrer, c’est ouvert à tout vent. Je commence par un petit tour au rez-de-chaussée, puis m’arrête pour préparer le matériel photo. Et là …
Passée la stupeur, je me dis que ce sera une visite pour les yeux. C’est toujours le but d’ailleurs : profiter du lieu, de sa découverte, de son ambiance. Je me résous à m’en remettre à mon téléphone. Après coup, ce fût un excellent moment. Comme à chaque visite, j’oublie le reste, je suis dans un instant détaché, totalement captivé (mais attentif).
Bon, évidemment, vu l’ancienneté du spot et le passage, impossible d’échapper aux mises en scène et au côté un peu « propret » de certaines pièces. Je ne déplacerai rien, c’est comme ça. Le rez-de-chaussée est assez « classique ». On tombe cependant assez vite en admiration devant les instruments de chimie (pourquoi Manoir de l’Alchimiste et pas Manoir du Chimiste ?). Aucune idée de leur usage. Il en manque. Ce sera le mantra de cette visite, les disparitions.
La décision de monter à l’étage, par cet escalier si célèbre qu’effrayant, est prise. Je suis en solo, comme je l’aime, j’avertis donc qui de droit d’où je suis au cas où je ne donnerai pas de nouvelles dans l’heure. Je m’accroche à la rambarde, le plus léger possible. Je me « limite » au premier étage et n’irai pas dans les combles.
Les pièces y sont vraiment sublimes. Le Manoir n’est pas dégradé par les visites. Seuls les « souvenirs emportés » par des indélicats viennent (un peu) ternir cette magnifique visite. Très peu à raconter sur son histoire, mais laissons parler l’imagination. A peine un « Registre du Logeur » pour signaler que la demeure accueillit de nombreux hôtes.
Au final, je reste touché par cette visite. Un réel moment d’apaisement et de calme. Je suis en revanche intrigué par toutes ces disparitions. Certes, je ne m’attendais pas à retrouver la collection de papillons. Mais voir que les instruments avec la verrerie de chimiste ou les téléphones ont été pris comme souvenirs … De même que le buste de Marianne caché (ou lui aussi disparu ?) par les précédents visiteurs me questionne (je n’ose poster le lien vers cette vidéo). Certains pensent sauver en cachant aux yeux des autres. Un raisonnement qui m’échappe.